What the Dickens ! Une expression aux origines Shakespearienne

Où Charles Dickens n’a strictement rien à voir dans cette histoire, un autre grand écrivain se cachant derrière l’expression.

Personne ne risque de s’exclamer What The Dickens ! dans la langue de Molière, ce qui nous donnerait plus un Que Diable (allaitil faire dans cette galère? n’est-ce pas ?). Voilà donc un euphémisme qu’on ne croise pas tous les jours et qui nous pousserait presque à l’attribuer à Charles Dickens, à qui on ne peut s’empêcher de penser lorsqu’on entend son fameux patronyme.

Jeune Dickens dans Grantchester
Dickens, le chien dans Grantchester tient son nom de l’expression ‘What the Dickens?’ – il a été rebaptisé Popette en français, pour saperlipopette.

L’écrivain britannique n’a cependant rien à voir avec l’expression, celle-ci ayant vu le jour bien avant sa naissance. En fait, il faudrait remonter deux siècles plus tôt pour retrouver sa première utilisation dans une pièce de William Shakespeare. Ce dernier est-il son inventeur ? Peut-être, peut-être pas…

Selon The American Heritage® Dictionary of the English Language (5e ed.) et The Oxford English Dictionary, Dickens est une altération de diable qui est alors employé comme une réprimande ou pour manifester son impatience, sa colère — souvent accompagné par des mots interrogatifs (what, where, how, why, etc.).

Mais qui a été la première personne a utilisé l’expression sur papier ?

On peut remonter en 1599 pour retrouver cet euphémisme dans la pièce historique King Edward the Fourth de Thomas Heywood :

What the dickens is it loue that makes ye prate to me so fondly ?

Que vient faire Shakespeare dans cette galère alors ? Il se trouve que le dramaturge l’a utilisée dans Les Joyeuses Commères de Windsor, nous venant de Mistress Page :

I cannot tell what the dickens his name is my husband had him of. What do you call your knight’s name, sirrah? [Je ne saurais vous dire comment se nomme celui qui en a fait cadeau à mon mari. L’ami, comment s’appelle votre chevalier ?  – source de la traduction.]

Ainsi, madame Page ne blasphème bien évidemment pas sous la plume de Shakespeare. La pièce a été publiée une première fois en 1602, mais aurait été écrite avant 1597 — ce qui nous place avant Thomas Heywood.

Et si Shakespeare n’avait en fait rien à voir là-dedans ? Abordé dans les Notes et Requêtes sur The Guardian, l’expression pourrait trouver son origine auprès d’un fabricant de bol en bois du 16e siècle qui se serait appelé Dickins, célèbre pour sa façon de perdre son argent.

Au bout du compte, Charles Dickens n’a rien à voir là-dedans et William Shakespeare – créateur ou non de cet euphémisme – un peu plus…

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