Les Séries Anglaises Historiques, une Brève Histoire Télévisuelle

Period drama, costume drama, historical drama… ils ont tous la même signification, mais chaque spectateur associe une image particulière à chacune de ses expressions. Quelle qu’elle soit, c’est avant tout une plongée dans une autre époque que les séries classées dans ce registre nous offrent.

Elles sont souvent plus connues pour leur histoire d’amour, mais cela s’avère bien réducteur. Les séries anglaises historiques ne se limitent pas aux simples enjeux romantiques et délivrent une étude sociale, une analyse de l’évolution des mœurs, des scènes d’action efficaces et bien plus encore.

Si le genre ne possède pas de frontières, il se révèle aussi — pour des raisons justifiées — associé à l’Angleterre qui s’est imposée comme une référence en la matière. Le costume drama est intrinsèquement lié à l’évolution de la série télévisée britannique, incarnant presque à sa façon les hauts et les bas de leur production. N’oublions pas non plus que bien qu’elle ouvre une fenêtre sur le passé, une série historique représente avant tout l’époque où elle a été conçue.

À travers cet article, je vous propose aujourd’hui de revenir sur les œuvres majeures du genre, agrémenté de quelques petits détours pour offrir un aperçu non exhaustif d’un pan incontournable de la télévision anglaise. Par choix, nous avons choisi de ne pas aller au-delà des années 1960 (avec une exception pour The Crown qui commence avant, mais va au-delà).

De 1950 à 2000, L’affirmation du period drama

1950-2000. Une longue période au cours de laquelle le period drama s’est affirmé et a pris multiples directions, offrant au genre différentes couleurs et subtilités. L’ Angleterre s’impose au sein de ces années comme le pays maitre en la matière en tablant dans tous les registres (peinture sociale, humour, satire, tragédie, faits historiques, adaptation, légendes, etc.). Ces productions vont participer à façonner l’image du period drama d’aujourd’hui.

The Adventures of the Scarlet Pimpernel (ITV, 1955)

Basée sur le roman d’aventures du même nom de 1905, The Adventures of the Scarlet Pimpernel fut l’une des premières séries dramatiques diffusées sur ITV qui avait commencé ses transmissions à Londres la semaine précedente

Bienvenue dans la forêt de Sherwood ! Première série internationale produite par des Britanniques, The Adventures of Robin Hood fut un investissement de taille pour ITV mais qui paya car la série se révèla être un succès aussi bien en Angleterre qu’aux Etats-Unis où elle était diffusée par CBS. Visant un jeune public masculin, elle plongeait donc le spectateur dans les aventures de Robin (Richard Greene) et de ses compagnons au cœur et aux alentours de la forêt de Sherwood.

The Adventures of Robin Hood (ITV, 1955-1960)

The Forsyte Saga (BBC Two, 1967)

Adaptation des romans de John Galsworthy, The Forsyte Saga avait pour vocation de pousser le spectateur à regarder BBC Two. Il fallut néanmoins attendre les rediffusions sur BBC One en 1968 pour que le programme rencontre le succès — avec 18 millions de téléspectateurs pour le final en 1969. Au vu de sa large audience, The Forsyte Saga s’est donc affirmé comme une série suivie autant par les hommes que par les femmes et ayant en son temps suscité quelques controverses. À cause de son image en noir et blanc, elle ne fut plus diffusée à la télévision britannique après le passage à la couleur.

Si les vieilles séries n’attirent pas forcément, La Dynastie des Forsyte a connu une nouvelle adaptation par ITV en 2002, avec Damian Lewis, Gina McKee, Rupert Graves, Corin Redgrave et Ioan Gruffudd. Elle mérite le coup d’œil rien que pour le jeu de ses deux têtes d’affiche. noter qu’une nouvelle adaptation est en préparation.

Vanity Fair est le premier costume drama à être diffusé en couleur. La série retrace l’histoire de Becky Sharpe (Susan Hampshire) durant 5 épisodes, avec une diffusion qui a débuté sur BBC Two le 2 décembre 1967. Cette adaptation est signée William Thackeray qui porte à l’écran son propre roman.

Vanity Fair (BBC Two, 1967)

Upstairs, Downstairs (ITV, 1971-1975)

Un des dramas les plus populaires toutes époques confondues, Upstairs, Downstairs — qui nous relate l’histoire de la famille aristocratique Bellamy et de leurs domestiques, séparés par les escaliers. En haut, les maitres et en bas, les servants — a participé a établir l’Angleterre en tant que leader dans le period drama. Programmé le dimanche soir à 22h15, un créneau horaire peu sollicité, et sans promotion, rien n’avait été pensé pour faire de la série un succès qui a trouvé son audience jusqu’à ce que cela devienne un hit. Grâce au show, ITV est devenue à cette période la chaine la plus suivie.

Pour dit-on, faire son Downton Abbey, BBC avait ramené Upstairs, Downstairs à la vie en 2010. Cela fut de courte durée (2 saisons pour un total de 6 épisodes), car le succès ne fut pas vraiment au rendez-vous malgré un solide casting (Jean Marsh, Eileen Atkins, Keeley Hawes, Ed Stoppard, Anne Reid, Claire Foy).

Produite par BBC et Universal Studios, Colditz plonge le spectateur au cœur d’une histoire vraie : celle de prisonniers de guerre planifiant leur évasion du château de Colditz au cours de la Seconde Guerre mondiale. Appuyé par l’Histoire avec un grand H, les spectateurs sont fascinés par la série, dont le plus gros reproche qui lui sera fait sera d’être beaucoup trop familiale et de dépeindre les Allemands sous un angle trop sympathique. Ces critiques ne changeront rien à la popularité de la série, mettant en scène entre autres Jack Hedley, Robert Wagner et David McCallum.

Colditz (BBC One, 1972-1974)

L’histoire de Colditz vu revisitée par ITV en 2005 avec une minisérie en deux parties mettant en scène Damian Lewis, Tom Hardy et Sophia Myle. Co-scénarisée par Peter Morgan et Richart Cottan, cette minisérie basée sur le livre d’Henry Cancellor et le documentaire Escape From Colditz de Channel 4 ne prétend aucunement à être historiquement véridique.

Poldark (BBC One, 1975-1977)

Basée sur la série de romans historiques de Winston Graham, Poldark transporte le spectateur en Cornouailles après la guerre d’Indépendance américaine. De retour cher lui, Ross Poldark (Robin Ellis) découvre que sa vie est en ruines et doit dès lors tout reconstruire. La saga soapesque des Poldark fascine les spectateurs que ce soit lors de sa diffusion en 1975 ou lorsque la série arrive finalement en cassette VHS en 1993, lui assurant ainsi une place parmi les costume drama les plus mémorables.

Poldark a été porté à l’écran trois fois, dont une seconde fois sous la forme d’un téléfilm en 1996. 40 ans après la première adaptation sous la forme sérielle, Poldark fut remis au goût du jour par BBC One en 2015, avec Aidan Turner dans le rôle titre. Comme la première série, elle rencontra un gros succès et dura ainsi 5 saisons (pour un total de 43 épisodes).

Basée sur la biographie du roi Édouard VII du Royaume-Uni par Sir Philip Magnus-Allcroft, Edward the Seventh revisite une page d’histoire en misant sur l’opulence et les ragots qui la rendirent plus que populaire au moment de sa diffusion. Edward & Mrs. Simpson s’inscrit dans la même lignée historique — sans l’opulence. La série fut par ailleurs diffusée du vivant de la duchesse de Windsor (Wallis Simpson).

Edward the Seventh (ITV, 1975)
Edward & Mrs. Simpson (ITV, 1978)

I, Claudius (BBC Two, 1976)

Basée sur le roman Moi, Claude de Robert Graves, I, Claudius nous plonge dans une page sombre de l’histoire romaine, retraçant les évènements de la mort de Marcellus à celle de Claudius. Cette œuvre toujours acclamée de nos jours a participé à repousser les limites du genre en montrant du sexe, de la violence et des meurtres et cela fut possible car il s’agissait d’une série historique. Reste que la scène de sexe qui a lieu entre mère et fils a tout de même été coupée aux États-Unis, pays où cette mini-série a eu une influence notable sur la production.

Livia Drusilla, épouse d’Augustus, mère de Tiberius et grand-mère de Claudius, est la figure centrale de la série Domina, lancée en 2021 sur Sky Atlantic. L’oeuvre prend ainsi des allures de thriller politique historique pour nous relater son ascension et les guerres de pouvoirs dans la Rome Antique sous un angle féminin.

Romantisme et rêve participent au succès de cette adaptation du roman d’Evelyn Waugh mettant en scène Jeremy Irons et Anthony Andrews. Tournée entièrement dans des décors réels, ce choix créatifs posera de gros problèmes budgétaires à ITV avec même un changement de réalisateur en cours de production. Reste que Brideshead Revisited émerge à une époque charnière pour les homosexuels, avec son récit centré, sans être explicite, sur une histoire d’amour gay.

Brideshead Revisited (ITV, 1981)

The Jewel in the Crown (ITV, 1984)

Basée sur The Raj Quartet de Paul Scott, The Jewel in the Crown entraine le spectateur en Inde, durant les derniers jours du Raj Britannique et participe dès lors à faire connaitre cette période peu reluisante de l’histoire britannique , épaulée par une romance passionnée et de la controverse avec un viol. La série a rendu célèbres Art Malik et Charles Dance.

30 ans après Jewel in the Crown, Channel 4 revint sur le déclin de l’Empire britannique avec Indian Summers (2015-2016) qui mélange rêve d’indépendance, intrigues politiques et romances. Cette ambitieuse création de Paul Rutman (Vera) avec Julie Walters fut développé pour durer 50 épisodes, jusqu’à l’indépendant de l’Inde en 1947 mais elle n’atteignit pas cette date. Elle fut annulée au terme de sa seconde saison, après 20 épisodes.

De son côté, ITV proposa Beecham House (2019) qui ne dura qu’une seule saison mais fut néanmoins noté pour offrir aux Indiens une place dans le récit.

Plongée dans le monde du music-hall en 1913 lorsque le jeune Richard Herncastle rejoint la représentation de magie de son oncle Nick, Lost Empires met en scène Colin Firth avant qu’il ne devienne Mr. Darcy, ainsi que Laurence Olivier et John Castle.

Lost Empires (ITV, 1986)

Sharpe (ITV, 1993-2008)

D’après les romans de Bernard Cornwell, Sharpe met en scène le héros d’action par excellence et nous relate les exploits de ce soldat britannique durant les guerres Napoléonniennes. Si Paul McGann avait été choisi pour incarner le premier rôle, il dut stopper le tournage suite à une blessure. Sean Bean le remplaça – et réorienta la série dans son sillage – pour donner vie au Sharpe qui est aujourd’hui connu des téléspectateurs.

Pour explorer les guerres napoléonniennes (et plus) sous un autre angle, Hornblower (1998-2003), le héros de C.S. Forester, prit la mer quelques années plus tard sous les traits de Ioan Gruffudd pour une série de huit téléfilms.

Assurément l’un des period drama les plus connus, Orgueil et Préjugés marque un tournant majeur pour le genre en l’orientant officiellement dans une direction plus « sexy ». Véritable phénomène – responsable du fait que Colin Firth est encore aujourd’hui associé au rôle de M. Darcy – cette adaptation du roman de Jane Austen est un succès critique et public qui dépassa les frontières de l’Angleterre.

Pride & Prejudice (BBC One, 1995)

Derrière l’adaptation d’Orgueil et Préjugés se trouve le scénariste Andrew Davies s’est bâti une réputation solide sur le petit écran grâce à la série, mais elle n’est pas la seule à retenir. Il a aussi signé Middlemarch (1994), avec Juliet Aubrey (qui gagna un Bafta pour ce rôle), Rufus Sewell, Douglas Hodge et Patrick Malahide. Peu connue chez nous, ce fut un véritable phénomène au moment de sa diffusion, entrainant le livre en haut des ventes et créant de nouvelles discussions autour de l’œuvre. Quelques années plus tard, il livra une adaptation de Vanity Fair (1998), qui a obtenu quelques nominations aux Baftas et dans laquelle on peut voir Philip Glenister avant qu’il ne devienne Gene Hunt (Life on Mars). Il a également porté à l’écran Guerre et Paix (2016),Les Misérables (2019) et A Suitable Boy (2020).

Notons aussi que le scénariste a adapté deux autres oeuvres de Jane Austen, à savoir Sense and Sensibility (BBC, 2008) et Sanditon (ITV, 2019).
Le classique Emma (2009) fut aussi porté à l’écran en mini-série par Sandy Welch.

The Fortunes and Misfortunes of Moll Flanders (ITV, 1996)

Avant de rejoindre la distribution d’Urgences, Alex Kingston se fit un nom en devant l’héroïne de Daniel Defoe dans Moll Flanders. La série continuait dès lors sur la lancée d’Orgueil et Préjugés pour du period drama perçu comme bien moins sage ! !  On notera également la présence de Daniel Craig dans la distribution.

Les années 2000, une période difficile avec des oeuvres marquantes

Les années 2000 se révèlent être une période compliquée pour le genre en Angleterre qui voit le téléspectateur s’en éloigner. En des temps économiques plus difficiles (pour autant qu’il y ait des périodes où ce n’est pas le cas) et où les risques se dotent d’autres formes, elles sont les premières coupées au budget. Cela n’empêchera pas le genre de délivrer des œuvres marquantes et de qualité au cours de cette période où BBC s’impose définitivement dans le registre.

BBC ne misait pas le moins du monde sur Nord et Sud, adaptation du roman d’Elizabeth Gaskell, au point que la chaine l’avait peu promu. Ce fut donc une belle surprise lorsqu’elle trouva immédiatement son public, jusqu’à entrainé le crash du site de la chaine anglaise suite à l’intérêt suscité par Richard Armitage dans la peau de John Thornton. Cette soudaine popularité fut comparée à celle rencontrée par Colin Firth avec Orgueil et Préjugés.

North & South (BBC One, 2004)

Bleak House (BBC One, 2005)

Adaptation du roman de Charles Dickens publié en France sous le titre La Maison d’Âpre-Vent signée Andrew Davies, Bleak House fut — à sa façon — une œuvre expérimentale avec une construction narrative développée pour avoir la forme d’un soap opera. Après un premier épisode d’une heure, la chaine diffusa deux épisodes d’une durée de 30 minutes chacun par semaine (le jeudi et le vendredi après Eastenders). Il s’agit aussi du premier period drama de la chaine à avoir été filmé en haute résolution, révélant alors plus de détails au niveau du maquillage et des décors.

Si l’adaptation de Our Mutual Friend (1998) lança en partie la nouvelle vague des adaptations de Dickens à la télévision, Bleak House s’est imposée comme la référence avec un succès critique et public que la chaine a tenté de reproduire avec Oliver Twist (2007) et Little Dorrit (2008). Il faut dire aussi que la barre avait été placée haut, la série ayant été honoré d’un Peabody award, a décroché 10 nominations aux Emmy (elle en a gagné deux) et a remporté 5 Baftas — dont celui de meilleur serial drama.

Fin 2011/début 2012, Charles Dickens était de nouveau à l’honneur à l’occasion de la célébration de son 200e anniversaire (Dickens étant né le 7 février 1812). BBC a alors consacré une saison à l’écrivain victorien au sein de laquelle elle diffusa une nouvelle adaptation de Great Expectations (où l’on retrouvait Gillian Anderson), The Mystery of Edwin Drood et une parodie de l’univers de Dickens avec The Bleak Old Shop of Stuff.

L’univers de Dickens prend régulièrement vie sur le petit écran, et c’est ainsi qu’il fut également exploré de manière originale avec Dickensian (2015-2016) qui explorait le passé de multiples personnages issus des romans de l’auteur. Par ailleurs, le scénariste Steven Knight (Peaky Blinders, voir plus bas!) a également porté à l’écran A Christmas Carol (2019) et Great Expectations (2023).

La reine Elizabeth I inspire les scénaristes en 2005 et se trouve au centre de deux séries télévisées. La plus célébrée est sans aucun doute Elizabeth I, série en deux parties diffusée sur Channel 4, où elle est incarnée par Helen Mirren qui remporta l’Emmy Award de la meilleure actrice pour sa performance. Pour des raisons financières, la série a été tournée en Lituanie où furent construits une partie des décors – les autres étant rajoutés numériquement.

Cette même année, Anne-Marie Duff endosse également le costume de la reine pour BBC dans The Virgin Queen qui, elle, fut tournée en Angleterre et nommé pour un Bafta.

Elizabeth I (Channel 4, 2005)
The Virgin Queen (BBC One, 2005)

Casanova (BBC Three, 2005)

Avant d’endosser le costume de Doctor Who, David Tennant se fait remarquer dans une autre série signée par Russell T. Davies, à savoir Casanova qui, comme son titre nous l’indique relate l’histoire de l’italien du XVIIIe siècle Giacomo Casanova , en s’appuyant sur ses mémoires en douze volumes.

Déjà adaptée de multiples fois à la télévision, au cinéma ou au théâtre, le roman de Charlotte Brontë continue d’inspirer. L’histoire est ainsi portée à l’écran par Sandy Welch pour BBC One en 2006 et est plébiscitée pour sa fidélité à l’oeuvre originale. La série décrocha plusieurs nominations (et remporta quelques prix) et lança la carrière de Ruth Wilson qui tient ici le rôle titre.

Jane Eyre (BBC One, 2006)

Cranford (BBC One, 2007-2009)

Classique Inspirée de trois romans d’Elizabeth Gaskell (Cranford, My Lady Ludlow et Mr. Harrison’s Confessions), Cranford s’impose par sa magnifique mise en scène, son ton malicieux et son impeccable casting. C’est alors un nouveau tournant qui est pris, un retour un retour à l’âge d’innocence et le début d’un renouveau qui s’affirmera dans les années suivantes.  La série décroche des nominations aux Baftas, aux Emmys et aux Golden Globes et en remportera quelques-uns.

La loi est mise à l’honneur dans les années 2000. Sur Channel 4, City Of Vice fit couler beaucoup d’encre grâce à son mélange de fiction et de faits réels pour retracer la création des forces de police moderne avec les Bow Street Runners. Sa partie historique fut ce qui a participé à son attrait, certains aspects artistiques ayant, pour de bonnes raisons, divisés.

City Of Vice (Channel 4, 2008)

Garrow’s Law (BBC One, 2009-2011)

L’univers judiciaire et l’univers historique se rencontre dans cette production qui revient ainsi sur le développement de la justice à Londres en s’inspirant de la vie de l’avocat William Garrow (joué par Andrew Buchan). La série s’impose sans difficulté grâce à sa fidélité historique et sa capacité à rendre son sujet accessible ; cela lui a d’ailleurs valu un History RTS Award.

Le spectateur découvre avec Land Girls le quotidien des femmes de la Women Lands Army avec un succès critique mitigé et beaucoup de critiques faites pour ses inexactitudes historiques, un public bien au rendez-vous. Surtout, la série a ouvert une nouvelle porte pour le Daytime drama, étant le premier à être un period drama.

Land Girls (BBC One, 2009)

Les années 2010, le renouveau du period drama

Amorcée à la fin des années 2000, c’est la confirmation début 2010 : nous sommes dans une période de renouveau pour le period drama. Le genre occupe de nouveau une place importante, ayant retrouvé les faveurs du public et l’intérêt des chaines, avec des succès internationaux et une forte concurrence.

Downton Abbey (ITV, 2010-2015)

Marchant dans les pas d’Upstairs, Downstairs, Downton Abbey nous relate le quotidien de la famille Crawley et de leurs domestiques à partir des années 1910… Pour donner corps à cette histoire, ITV met les petits plats dans les grands et cela va être (de nouveau) payant. La chaine anglaise rencontre dès son lancement le succès — avec des critiques élogieuses et des spectateurs qui replongent avec plaisir dans le 20e siècle dépeint par Julian Fellowes. Si la qualité de l’œuvre ne fait pas l’unanimité par la suite, la série devient un véritable phénomène international allant jusqu’à rejoindre le livre des records pour être la série en langue anglaise la plus acclamée de 2011. Elle est aussi la plus suivie sur la chaine ITV, devenant le costume drama le plus populaire depuis Brideshead Revisited (en 1981).

Le succès est tel que l’histoire de la famille Crawley s’est poursuivi sur grand écran avec deux films (et un troisième à venir).

Julian Fellowes est un scénariste spécialisé dans la fiction historique. Il a revisité l’histoire du Titanic (ITV, 2012), est revenu sur les origines du football avec The English Game (2020, Netflix), a porté à l’écran Doctor Thorne (ITV, 2016) et son propre roman Belgravia (ITV, 2020). De l’autre côté de l’Atlantique, il a redonné vie au Gilded Age pour HBO (2022-)

L’année 2011 est marqué par le retour en force de BBC Two dans le drama suite à de gros investissements. La première série a faire son apparition à l’antenne est alors The Crimson Petal And The White, adaptation du roman de Michel Faber avec Romola Garai et Chris O’Dowd qui a pour vocation de rappeler aux téléspectateurs la réputation de la chaine à diffuser des programmes ambitieux.

Quelques mois plus tard, la chaine lança The Hour, également avec Romola Garai qui nous ramène ainsi dans les années 50 pour suivre l’équipe d’une nouvelle émission d’actualité.

The Crimson Petal and the White (BBC Two, 2011)
The Hour (BBC Two, 2011-2012)

The Paradise (BBC One, 2012-2013)
Mr Selfridge (ITV, 2013-2016)

L’univers du shopping est à l’honneur à la télévision britannique. Il est dit que The Paradise est la réponse de la Beeb à Mr. Selfridge, si ce n’est qu’elle fut mise à l’antenne avant ! Semble-t-il, BBC aurait mis les bouchées double pour la délivrer plus tôt. Libre adaptation du roman Au Bonheur des Dames d’Emile Zola, The Paradise suit Denise (Joanna Vanderham), une femme qui devient vendeuse au moment où la société découvre les joies et les tentations du shopping. Pour éviter de se confronter à Downton Abbey, BBC One modifia ses habitudes et ne programma pas cette série historique le dimanche mais le mardi soir où elle rencontra suffisamment de succès pour obtenir une saison.

Nous venant d’Andrew Davies, Mr. Selfridge ouvrit quant à lui ses portes au début de l’année 2013 pour nous relater l’histoire du grand magasin londonien crée par l’homme d’affaires américain Harry Gordon Selfridge (Jeremy Piven) durant 4 saisons.

Call the Midwife, ou SOS sages-femmes passionnent le public britannique depuis plus de 10 ans maintenant! Nous plongeant dans le quotidien de sages femmes dans les années 1950-1960, la série détrône Downton Abbey au titre de nouveauté la plus suivie de ces dernières années — preuve que le period drama se porte bien. Elle est alors suivie en moyenne par plus de 10 millions de téléspectateurs et continue aujourd’hui de rassembler près de 7 millions de personnes. Célébrée pour se confronter à de nombreux sujets sociaux, culturels et économiques (dont le système de santé, la grossesse adolescente, l’adoption, la fausse couche, la prostitution, l’inceste, la religion, le racisme, la pauvreté et plus encore), Call The Midwife est aussi devenu l’un des rendez-vous de fêtes de fin d’année avec son épisode spécial de Noël.

Call the Midwife (BBC One, 2012-present)

Ripper Street (BBC One/Amazon, 2012-2016)

Se déroulant après les meurtres commis par Jack L’éventreur à Whitechapel, Ripper Street est une série victorienne qui se présente comme voulant offrir une représentation crédible de la période tout en prenant un certain nombre de libertés sur un plan chronologique. Elle attira au point de départ l’attention pour son utilisation notable de la violence et s’est vu être autant plébiscitée que critiquée pour sa sombre ambiance.

Malgré des chiffres d’audiences faibles entrainant son annulation à la fin de la saison 2, Ripper Street devint la première série anglaise à être sauvée par un service de streaming — dans le cas présent Amazon Prime Video qui, plus que satisfait des performances de la série, l’a renouvela jusqu’à sa saison 5.

Les séries policières historiques sont en général moins violentes que Ripper Street et prennent souvent place après la Seconde Guerre mondiale. C’était en tout cas le cas de Foyle’s War (2002-2015) sur ITV. De même, l’action de Grantchester (ITV, 2014-) débute quelques années après la guerre. Toujours sur ITV, Les Enquêtes de Morse (2012-2023) — préquelle de l’inspecteur Morse — nous ramenait quant à elle dans les années 60, à l’image de l’inspecteur George Gently (2007-2017) sur BBC One.

Après Ripper Street, ce fut au tour de Peaky Blinders de venir confirmer la bonne santé et la diversité des séries historiques britanniques, toujours capable de surprendre et de délivrer des histoires fortes. La série de Steven Knight est alors célébrée pour son style visuel, ses choix musicaux anachroniques, son casting et son exploration d’une période historique que l’on retrouve rarement à la télévision. Relatant l’histoire d’une famille de criminels de la communauté de gitans à Birmingham et ses environs dans l’entre deux-guerres, Peaky Blinders est devenue un véritable phénomène international et l’une des séries britanniques à l’impact culturel bien visible en Angleterre. Suite à sa diffusion, les prénoms Arthur et Ada sont redevenus populaires!

Peaky Blinders (BBC Two/BBC One, 2013-2022)

Tom Hardy, qui interprète Alfie Solomons, et Steven Knight, se sont par la suite associés pour donner le jour à une autre oeuvre stylisée, à savoir Taboo (2017). La série nous remané alors à Londres en 1814 où James Delaney fait son retour d’entre les morts pour toucher l’héritage de son père. Bien que la série fut renouvelée pour une saison 2, celle-ci n’a toujours pas vue le jour.

The Crimson Field, The Passing Bells, 37 Days (BBC One, 2014)

BBC One marqua le centenaire de la Première Guerre mondiale avec « The BBC World War I centenary season » lancée en 2014. La chaine produisit dès lors de nombreux programmes pour la radio et la télévision, incluant des documentaires, des débats, des programmes pour enfants et des séries télévisées. À cette occasion, elle diffusa au cours de l’année The Crimson Field qui se focalise sur les médecins et patients d’un hôpital de campagne en France; The Passing Bells qui explore la guerre à travers les yeux de deux adolescents, un Anglais et un Allemand; et 37 Days qui couvre les jours précédant la Guerre.

Portant les deux premiers romans de la trilogie d’Hilary Mantel sur Thomas Cromwell à l’écran, Wolf Hall fut l’évènement télévisuel de l’année 2015 et s’est même offert le meilleur démarrage d’une série sur BBC Two en 10 ans. Bien que la suite des audiences ne furent pas aussi bonnes, cette production nous ramenant à l’époque des Tudors pour relater l’ascension du ministre Thomas Cromwell auprès du roi Henri VIII s’est imposé grâce à sa production hors pair et les multiples discussions qui en ont émergé autour de la véracité historique et du portrait controversée sympathique fait de sa figure principale. L’une des plus belles réussites de cette période, une suite et conclusion adaptant le dernier livre est annoncée pour 2024-2025

Wolf Hall (BBC Two, 2015)

Si Wolf Hall se distingue par ses choix créatifs et narratifs, il existe de nombreuses autres productions britanniques explorant la dynastie des Tudors. Parmi les plus célébrées et importantes du petit écran, nous avons Les Six Femmes d’Henri VIII (1970) qui donna le jour à une suite, Elizabeth R (1971) avec Glenda Jackson, ainsi qu’une prequelle, The Shadow of the Tower (1972) avec James Maxwell et Norma West dans la peau des parents d’Henry, Henry VII et Elizabeth of York.

Jonathan Rhys Meyers endossa par ailleurs le rôle du roi Henry VIII durant 4 saisons de la série The Tudors (2007-2010). Pour une point de vue plus féminin de l’histoire, plusieurs courtes séries basées sur les romans de Philippa Gregory ont également ont produites par Starz et BBC : The White Queen (2013), The White Princess (2017) et The Spanish Princess (2018-2020).

Enfin, n’oublions pas, pour une note plus humoristique, la présence de la reine Elizabeth I (incarnée par Miranda Richardson) dans la saison 2 de Blackadder (1986).

The Last Kingdom (BBC Two/Netflix, 2015-2022)

Après Sharpe, Bernard Cornwell a vu une autre de ses séries littéraires adaptées pour le petit écran. The Last Kingdom nous chronique l’unification de l’Angleterre à travers le destin de Uhtred de Bebbanburg (Alexander Dreymon), fils orphelin d’un noble saxon kidnappé par les Scandinaves qui l’élève comme l’un des leurs. Il se retrouve dès lors pris entre son pays d’origine et le peuple qui l’a élevé. Au départ comparée à Game of Thrones, The Last Kingdom illustrait surtout un appétit nouveau pour une période historique différente – apparu deux dans après Vikings (2013-2020).

Pour succéder à Downton Abbey, la chaine ITV tourna son attention vers la royauté britannique et plus précisément choisit d’offrir une relecture romancée du règne de Victoria (Jenna Coleman). Avec une emphase sur sa vie privée et son histoire avec le Prince Albert, la série joue avec la ligne temporelle et les faits, mélange figures historiques et personnages de fiction, dans des décors souvent somptueux.

ITV ne fut pas la seule à mettre les moyens pour sa reine. Dans le domaine, personne ne pouvait faire plus que Netflix avec un budget de 100 millions de livres pour la première saison de The Crown – en faisant à ce moment-là la série la plus chère diffusée sur le service de streaming. La série qui nous relate l’histoire de la reine Elizabeth II (Claire Foy, Olivia Colman, Imelda Staunton) attire les regards et les récompenses, mais également les critiques pour sa représentation d’évènements historiques — surtout à partir de sa saison 4.

Victoria (ITV, 2016-2019)
The Crown (Netflix, 2016-2023)

Gentleman Jack (BBC One/HBO, 2019-2022)

Nous relatant la vie de la diariste lesbienne Anne Lister, Gentleman Jack est énergique, malicieuse et unique en son genre. Il faut dire que des héroïnes comme Anne, il y en a peu sur le petit écran, et encore moins dans une série historique. Embrassée par la communauté lesbienne, elle est devenue malgré finalement peu d’épisodes, une icône internationale, avec des spectatrices du monde entier se rendant à Shibden Hall, près Halifax pour célébrer Anne Lister.

Bien avant Gentleman Jack, BBC One portait à l’écran Tipping The Velvet (2002), le roman de Sarah Waters, pour nous relater la découverte du saphisme par Nancy lorsqu’elle s’éprend de Kitty, une actrice de music-hall dans l’Angleterre victorienne de la fin du XIXe siècle. La série fut alors présentée comme l’oeuvre la plus explicite diffusée sur la chaine. dans sa représentation des relations sexuelles entre lesbiennes